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jeudi 27 novembre 2014

Gabon : Pierre Péan, le scandale de trop



Par Marwane Ben Yahmed



Filiation douteuse, diplômes truqués, malversations, instigation d'assassinats... Dans son dernier livre, Pierre péan fait d'Ali Bongo Ondimba le diable en personne. Mais l'outrance est parfois mauvaise conseillère.

Quelle mouche a donc piqué Pierre Péan ? L'écrivain-journaliste français, 76 ans, trente-trois ouvrages, souvent à succès, au compteur, crée encore la polémique avec Nouvelles Affaires africaines. Mensonges et Pillages au Gabon, sorti chez Fayard le 29 octobre. Deux cent cinquante pages au vitriol, quasi exclusivement consacrées à Ali Bongo Ondimba (ABO), fils de feu Omar - qui inspirait à Péan une fascination certaine.
À en croire l'auteur, l'actuel chef de l'État est le diable en personne... Il ne serait pas gabonais et n'aimerait guère ses concitoyens, lui, le Biafrais adopté par Omar parce que l'épouse de celui-ci, Joséphine Kama - alias Patience Dabany -, aurait été stérile (Péan ne dit mot de sa soeur disparue, Amissa, dont on se demande alors comment elle a pu naître "normalement").
Il ne serait pas titulaire d'un doctorat en droit public de l'université Panthéon-Sorbonne, n'aurait pas été élu en 2009 (Péan a pourtant affirmé l'inverse, en 2011, à la télévision gabonaise : "[Son] élection est remarquable car il n'y a pas eu bourrage des urnes ou triches, ce qui est assez exceptionnel dans la région"), serait un voleur entouré d'une "légion étrangère" mafieuse, et même un assassin.
Pour couronner le tout, le chef de l'État serait un adepte du vaudou et un homme aux moeurs douteuses.
Ses victimes supposées : Georges Rawiri, l'ancien président du Sénat, empoisonné, et Jean-Pierre Lemboumba, cible d'une tentative de meurtre mais aujourd'hui conseiller d'ABO (une "victime", donc, frappée d'amnésie ou vraiment pas rancunière). Pour couronner le tout, le chef de l'État serait un adepte du vaudou et un homme aux moeurs douteuses.
La dérive du journaliste devenu pamphlétaire
Ce livre, mal édité (trop vite en tout cas) et mal écrit (Péan n'a jamais brillé en la matière), illustre la dérive d'un journaliste qui s'est mué en pamphlétaire sans jamais le reconnaître. Voilà près de dix ans que Péan n'est plus Péan. Depuis Noires Fureurs, blancs menteurs (2005), consacré au Rwanda de 1990-1994, puis avec Le Monde selon K. (2009), sur Bernard Kouchner, ou Carnages. Les Guerres secrètes des grandes puissances en Afrique (2010), il s'attaque ad nauseam à tous ceux qui, selon lui, tels Kagamé ou ABO, s'en prennent à la France, à ses intérêts ou à son armée. Avec des relents de nationalisme cocardier, d'antiaméricanisme primaire et la conviction que la CIA trame avec le Mossad un vaste complot mondial.
Outre le fait que son récit est truffé d'inexactitudes, voire d'erreurs historiques (notamment quand il explique qu'il ne se passait rien à Brazzaville en 1959, alors que Laris et Mbochis s'affrontaient violemment sous les ordres de Fulbert Youlou et de Jacques Opangault), le vrai problème concerne son "enquête", celle d'un procureur qui ne se rend même plus sur les lieux évoqués.
Ses "sources" ? La rumeur, le fameux kongossa gabonais, qu'il transforme sans sourciller en vérité, les journaux d'opposition cités à l'envi, une pléthore d'anonymes, et les ennemis d'ABO. Jamais il n'a tenté de vérifier ses "informations" auprès des intéressés. Pis, il fait parler des morts - Omar Bongo, Jacques Foccart, Maurice Delaunay - qui ne le contrediront évidemment jamais.
Plainte en diffamation
Dernière ombre au tableau : le contrat envoyé par le sulfureux homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine au Palais du bord de mer proposant, moyennant plus de 10 millions d'euros, de surseoir à la parution dudit ouvrage. Si Péan nie être à l'origine de la manoeuvre, il s'est montré pour le moins imprudent en demandant à plusieurs reprises, entre janvier et mars 2014, à Alain-Claude Bilie-By-Nze, porte-parole d'ABO, de recruter l'un de ses amis, Jean-Louis Gros.
Bizarre, compte tenu de l'idée qu'il se fait du Gabon d'Ali. Et troublant, quand on sait que l'article 4 du contrat proposé par Takieddine comporte une clause visant à "procéder au règlement immédiat du contentieux en suspens portant sur des engagements existant entre [la présidence] et la personne qui lui a été désignée par M. Pierre Péan". Serait-il ici question de Jean-Louis Gros et de son recrutement ?
Pour l'ensemble de cette "oeuvre", Péan a rendez-vous avec la justice : une plainte en diffamation a été déposée le 7 novembre, pour le compte d'ABO, devant le tribunal de grande instance de Paris.

vendredi 21 novembre 2014

Affaire Péan : Paul Okili Boyer, témoin pour Ali Bongo



Nommément cité par le journaliste-écrivain français, ce compatriote affirme avoir vu le président de la République, dont l’identité, la filiation et l’état-civil sont controversés, dans sa prime enfance, affirmant être prêt à en dire davantage.







Réagissant initialement, sur le forum de Gabonreview, à la mention de son nom sous l’article «Ntoutoume Nkoghe: «C’est à travers le livre de Pierre Péan que le Front uni découvre l’histoire du Gabon?», Paul Okili Boyer a finalement décidé de se prononcer. Vertement critiqué dans les commentaires des internautes pour son supposé soutien à Ali Bongo et invité à s’occuper de ses oignons au motif qu’il ne serait pas Gabonais, Paul Okili Boyer a tenu à livrer sa vérité.

Lu sur Infos Kinguelé, le plus grand réseau social gabonais adossé à Facebook, des internautes ont attribué à Okili Boyer les propos suivant : «Aujourd’hui… une vidéo sera faites pour donner des ’’Révélations’’ non encore connues sur le sujet qui fâche la Population Gabonaise. Après les révélations ’’explosives’’ de Monsieur Péan, et l’explication de ma jeunesse à 18 ans auprès des ’’services’’ pour aller chercher les enfants Biafrais en 1968 à bord des Avions DC 3 de Transgabon, il est de mon devoir de m’expliquer. J’aurais espéré que Michel Ogandaga ne continue pas son imbécilité de continuer à mettre sur Internet des Vidéos (qui a l’époque de 2009, ont été ’’dirigées’’ dans le cadre d’une campagne électorale). Mais voulant être trop probant, Monsieur Ogandaga en fait un peu de trop. Puisqu’il est de notoriété publique que j’ai la solution du problème… pourquoi ne m’entends donc pas directement en 2014 depuis la France avec les Vraies arguties de cette histoire…

Si je suis cité, c’est certainement, que je connais… et justement je connais !!!! Que veut-on cacher au peuple gabonais ?… à certains de voir, car Monsieur Michel Ogandaga, vous êtes un menteur… Dans les jours qui viennent vous aurez la Vidéo qui va expliquer tout.» Pour de nombreux commentateurs, à travers cette annonce qui sonnait comme un appel du pied, Paul Okili Boyer voulait certainement monnayer son témoignage dans la longue série du genre ayant suivi la publication du livre de Pierre Péan. Ils ont dû se tromper.

Dans une réaction parvenue à notre rédaction il souligne que «Péan en page 9 de son livre, fait sous entendre que j’aurais été celui qui aurait amené monsieur Ali Bongo Ondimba du Biafra à Libreville en 1968». Or soutient Okili Boyer, «en 1965, je connaissais très bien Albert Bernard Bongo qui habitait avenue de Cointet à Libreville, et comme j’étais souvent chez ma tante Lapeby à côté du centre social, j’ai vu très souvent Marie Joséphine Bongo avec le petit Alain-Bernard, puisque mon oncle Georges Damas Aleka était à cette époque président de l’Assemblée nationale».

Au terme de ce témoignage laconique, Paul Okili Boyer se réserve même le droit de quitter la France, où il vit en exil depuis 20 ans, pour «venir à Libreville s’il faut pour expliciter beaucoup d’autres moments entre 1966 et 1969 avant mon départ pour l’armée, où j’ai eu à voir le jeune Alain Bernard». Car conclut-il, «même en ma qualité d’opposant je trouve absolument irresponsable le fait d’insulter Ali Bongo, qui avait le nom d’enfance Alain-Bernard».

«Je me déplace s’il le faut à Libreville et viendrais apporter bien d’autres éléments, car on raconte beaucoup trop de fausses rumeurs sans aucun fondements», conclut-il. Si Okili Boyer a bien vu Ali Bongo enfant, en 1965 donc bien avant la guerre du Biafra, le chef de l’Etat gabonais ne saurait donc faire partie des orphelins amenés au Gabon durant ce conflit civil nigérian qui a démarré le 6 juillet 1967.